Si
quelqu’un vous dit : « Je suis joyeux à l’idée que tu
existes », vous prendrez cela pour une déclaration d’amour, et
vous aurez évidemment raison. Vous aurez aussi beaucoup de chance,
parce que c’est une déclaration spinoziste d’amour, ça n’arrive pas
tous les jours, beaucoup de gens sont morts sans avoir entendu
ça ; et puis, surtout, c’est une déclaration d’amour qui ne vous
demande rien. Et ça, c’est tout à fait exceptionnel. Profitez-en
bien !
Parce que si quelqu’un vous dit : « Je
t’aime », mais s’avère être platonicien, son « je
t’aime » signifie en vérité « Tu me manques, je te
veux ». Donc il demande tout, puisqu’il vous demande vous-même.
Alors que si quelqu’un vous dit : « Je t’aime » en un
sens spinoziste, cela veut dire : « Tu es la cause de ma
joie, je me réjouis à l’idée que tu existes ». Il ne demande rien
puisque votre existence suffit à le convaincre et à le satisfaire.
Pour
Spinoza, l’amour n’est pas manque. Pour lui comme pour Platon l’amour
est désir ; mais si pour Platon le désir est manque, pour Spinoza
le désir est puissance (par exemple au sens où l’on parle de la
puissance sexuelle, mais pas seulement) : puissance de jouir et
jouissance en puissance. L’amour est désir, oui, dirait Spinoza, mais
non pas manque : l’amour est puissance et joie.
Source :
http://rimbaudfr.wordpress.com/2006/05/06/lamour-selon-platon-et-spinoza/